Mickaël
Phelippeau

22.03.2024

Le bi-portrait

Le bi-portrait commence par un projet photographique.

Le bi-portrait est pensé comme une démarche, plutôt qu’un projet, en ce sens qu’il est en perpétuelle évolution, tant dans sa forme que dans ce qu’il tend à dire et à provoquer.

Le bi-portrait part aussi d’une interrogation : qu’est-ce qu’être interprète aujourd’hui (je suis entre autres danseur interprète) ?

Lorsque j’ai entamé le bi-portrait, je le voulais simple et efficace dans sa mise en oeuvre. Il était question de reconversion.

Le bi-portrait est avant tout un désir d’aller vers.

Le bi-portrait a un sous-titre : “ou un prétexte à la rencontre”. Cette dernière est parfois provoquée, parfois inattendue. Parfois, au hasard de la traversée des rues d’une ville, croiser ses habitants, ses professionnels, ses pratiquants. Le médium photographique est un moyen simple et tangible pour aborder les gens.

Le bi-portrait suit un principe très simple d’échange de panoplies. Dans un premier temps, au-delà d’un savoir-faire, touchons aux codes. L’habit et le cadre font le moine, me suis-je dit.

Le bi-portrait se compose:

d’un premier portrait (le/la bi-portraituré/e, soit le/la rencontré/e) :
À cette personne, et dans sont contexte, faire porter une tenue qui m’appartient, toujours la même : chemise coton jaune, pantalons polyester et bottines cuir.
Par homogénéisation liée au motif que représente la tenue « bi-portrait », laisser apparaître un visage, un corps, une personne.
d’un second portrait (le bi-portraitiste, soit moi-même) :
Dans le même contexte, avec le même cadrage, revêtir pour ma part l’uniforme que ces personnes me proposent, panoplies de travail parfois marquées, parfois anodines, vêtements quotidiens. Me mettre dans la peau de, pure fiction le temps de, dans le contexte de. Le corps devient ici le motif.

Le bi-portrait génère ensuite des extensions, des formes autres. Il convoque ainsi des médias divers. Suite au projet photographique, films et projets chorégraphiques ont été créés. Depuis 2008, même si les pièces chorégraphiques ne portent pas nécessairement le titre « bi-portrait » (les seules exceptions sont bi-portrait Jean-Yves, duo avec Jean-Yves Robert, curé de la ville de Bègles, et bi-portrait Yves C., duo élargi avec Yves Calvez, chorégraphe d’un cercle de danse traditionnelle bretonne), elles se situent cependant dans la droite ligne de la démarche. Au fur et à mesure, la danse a pris le pas sur la photographie et les partenaires sur le plateau se sont multipliés : Valérie C., Claire H., Sabine M., Pascale P., Elli M., Lizza B.-T., Agnès G., Laure L., Françoise R., Amélina R., Jeanne Bardin-M., Cécile G., Marie-Martine G., Anne-Marie P., Franseza B., Anne B., Marie-Louise H., Bénédite R. S., André D., Yannick L. B., Renaud M., Stéphane D., Jacques D., Jean-Noël L., Jérôme B., Manfred B., Bertrand G., Jérôme H., Grégoire J., Clément R., Fiona A. B., Rapahële A., Sarah B., Marielle K., Catherine Q., Camille V., Laure G., Chantal H., Claudie P., Françoise P., Valentin R., Corinne S., Gilles A., Thierry D., Jean-Paul J., Lionel R., Yvon D., Alain I., Fabrice L., Raphaël M., Jean R., Jacques V., Célia H., Ethan C., Jonas C., Abigail F., Chiara G., Pauline S., Flore C., Pascal M., Aliénor M. & Estelle T., Lola R., Anastasia M., Erwan K., Hortense B., Bettina B. P., Lou B., Carolle B., Mélanie C., Valérie G., Brigitte H., Olivia M., Vanessa M., Coraline P., Lou C., Ben S. C., Luc S., Heddy S….

Le bi-portrait n’est ni un portrait d’autrui et encore moins un autoportrait.

Le bi-portrait permet le déplacement de soi, il l’exige même.

Le bi-portrait est géographique, il se développe en fonction d’un contexte, il se déploie au fur et à mesure, en réseaux, en fonction des liens que génèrent les gens, par effet de ricochet, comme un jeu de dominos, et comme si chaque portrait portait en lui les traces des précédents.

Mickaël Phelippeau