Vasanthi & Vani Theaters
Vasanthi & Vani Theaters, 2008
Installation vidéo. Durée totale : 45 min (1 x 14 min - 1 x 15 min - 1 x 16 min)
Production : Les Ateliers de Rennes - Biennale d’art contemporain / Triangle
Vue de l’installation vidéo au Triangle, Rennes
Photo : DR
Photogrammes extraits des vidéos
10 Novembre 2007. Arrivée de Benoît Laffiché à Chennai, Inde :
« Je connais le quartier de Triplicane, l’architecture, les immeubles, les échoppes, les cafés, les arbres, je peux m’orienter. Je sais la position du corps à adopter le long des trottoirs bondés. Je n’ai aucune réalité ici, je ne suis rien. C’est pas si mal. Les ouvriers du chantier de démolition reprennent le travail lundi… J’y serai… C’est un immeuble coloré, imposant, un ancien cinéma. On y devine les salles de projection, l’emplacement des écrans ; la signalétique résiste. Au détour des gravats, des kilomètres de films 35 mm, les derniers projetés. La démolition est bien avancée, elle se fait à la main et de temps en temps avec des machines. Ils sont neuf ouvriers sur le chantier, on apprend à se connaître… Tout le monde se demande ce que je cherche… » Le chantier est à 20 minutes de Triplicane. Benoît Laffiché est allé à la rencontre des hommes qui travaillent dans le Vasanthi & Vani Theaters. Les gravats s’amoncellent, les ouvriers se déplacent souvent nus pieds. Prudemment, délicatement, ils nettoient les briques, dégagent le fer à béton, les circuits électriques, utilisent haches et masses, s’accompagnant d’un chant pour déplacer la structure métallique. Rien n’est perdu tout est récupéré. Pas de stress ni de flux tendu, le travail est fait à temps. Vasanthi & Vani Theaters « donne à lire la complexité des échanges économiques en Inde. Les hedge Funds, des acteurs financiers internationaux, investissent aujourd’hui avec des stratégies innovantes et risquées dans l’immobilier » dit Benoît Laffiché interrogeant les réalités géopolitiques et sociales des lieux où il se déplace. Ce chantier semble être le reflet de l’Inde moderne avec ses traditions ancrées dans la vie où se déploient les réalités de la mondialisation. L’ouvrage est fait en commun, les repas partagés. Les gestes, les vêtements, les échanges sont élégants. Est-ce là et ailleurs que se glisse une des interrogations vers laquelle Benoît Laffiché revient sans cesse : la logique de survie ? « Chaque jour les Indiens déploient une capacité d’adaptation inventive. C’est là que je vois la logique de survie, l’attention aux formes à l’intérieur de la nécessité économique, des gestes discrets de résistance ». Benoît Laffiché filme en retrait, à distance, les hommes « attentifs et détachés », les relations, les paysages. II souligne les attitudes, les rythmes, les formes, les espaces et le temps vécus ; s’attarde sur les trouées dégagées dans les murs démolis, tels des écrans où apparaissent des scènes de la vie quotidienne. Le monde comme atelier, disponible à l’infini, s’ouvre sur une mondialité à inventer. L’échange, l’expérience, le déplacement, la manière d’être font la force du travail de Benoît Laffiché.
Yvette Le Gall.
Texte extrait du document de présentation de l’exposition au Triangle à Rennes.
Consulter l'entretien entre Yvette Le Gall et Benoît Laffiché (format pdf)