Hilary
Galbreaith

12.01.2024

Retour à la contre nature

Par Pedro Morais, 2020

Plutôt que de transformer l’écologie en sujet artistique, il faudrait commencer par l’appliquer à l’échelle des modes de production, du transport et du stockage des oeuvres. Cette économie de moyens établit la condition esthétique «do-it-yourself» du travail de Hilary Galbreaith, proche du cinéma primitif et du fanzine. Issu.e d’une famille californienne de militaires, passionné.e.s de science et technologie, iel s’intéresse à la capacité de la science-fiction à construire des hypothèses qui transforment notre rapport aux espèces, au non humain, au corps ou au langage. Dans la vidéo «Bug Eyes Episode 2 : The Garden», iel met en scène un concours de télé-réalité avec des humains transformés en insectes. Leur désir d’un «retour à la nature» pour former des communautés anarchistes se trouve finalement controlé par les valeurs de la classe moyenne. Pourtant, si pour l’artiste le «jardin» symbolise la culture du faux, cela lui permettra de dépasser l’opposition nature/culture et d’identifier un réel besoin pour un mode de vie post-capitaliste et décroissant. Plutôt que le cynisme, l’artiste place le désordre et le grotesque carnavalesque à l’intérieur des contradictions d’un monde techno-bureaucratique. Qu’il s’agisse de prothèses qui contrôlent les odeurs, d’un jeu sexuel de réalité virtuelle qui devient sadique ou d’entreprises qui agissent comme des oeuvres conceptuelles («Golden Hole»), de deux sorcières plongées dans un univers mutant où le design scandinave devient l’esthétique de l’horreur («LifeHack») ou d’une web-série publiée par l’artiste sur Instagram inspirée d’un film féministe underground qui met à mal le phallocentrisme d’humains-saucisses («Sausageland»), le travail de Hilary Galbreaith fait l’autopsie des systèmes de pouvoir biopolitiques.

Pedro Morais