Projet réalisé avec le soutien de la région Bretagne à l’artiste Emmanuelle Rosso dans le cadre de l’appel à projets 2022 “Aide aux jeunes artistes plasticien.ne.s en Bretagne » et le concours de Documents d’artistes Bretagne

Le projet “Corps-Île” d’Emmanuelle Rosso revisite l’art d’habiter un espace, où l’île de Belle Île en Mer devient un organisme vivant à part entière. Ce projet établit une analogie profonde entre la vie humaine et les éléments naturels emblématiques de l’île, les rochers et l’eau. Il explore les parallèles entre les cycles de solitude et de connexion que nous traversons en tant qu’êtres humains, tout en mettant en lumière la résilience extraordinaire des rochers.

Ces géants de pierre, sculptés par les forces de la mer et le passage du temps, leurs lignes, leurs failles, leurs « drapés » deviennent une source d’inspiration inestimable, car elles représentent les marques du temps, les strates de l’histoire géologique et incarnent la mémoire vivante de l’île, témoignant de sa relation éternelle avec l’eau.

À travers une variété de médiums, de la peinture en passant par le dessin et l’écriture ou la photographie, Emmanuelle Rosso crée un écosystème évolutif qui incite le public à repenser sa relation avec l’environnement et à explorer de nouvelles perspectives sur la coexistence entre l’individu et le monde qui l’entoure.

La peinture occupe une place centrale dans son travail, qu’elle considère comme une performance intime, une traversée visant à révéler les images enfouies dans le support. Le projet cherche à bousculer certaines conventions ou attente que l’on peut avoir face à une oeuvre, en jouant avec des éléments telles que les imperfections, les maladresses et les hésitations. Ce projet nous invite à explorer la complexe symbiose entre la solitude et le sentiment d’appartenance, tout en percevant l’île elle-même comme un être vivant, un interlocuteur avec lequel nous dialoguons.

A propos des Baigneuses

”Les Baigneuses” est un processus né de quinze années de recherche et d’exploration minutieuse de la couleur et du textile. Cette initiative est le résultat d’un parcours riche en découvertes et en expérimentations, ayant pour objectif de fusionner la couleur et la matière textile d’une manière profonde et significative.
L’artiste, formée aux techniques de la teinture aux Beaux-Arts de Limoges sous la tutelle du maître teinturier Philippe Chazelle, a choisi d’établir son atelier sur la magnifique île de Belle-Île-en-Mer, en Bretagne, en 2017. Là-bas, elle a entrepris un voyage artistique audacieux en explorant la fixation des couleurs de manière différente de la teinturerie traditionnelle. Elle a décidé d’utiliser le sel de l’océan comme mordant pour fixer les couleurs sur le textile. Ce geste puissant de tremper les tissus dans l’océan a pris une dimension rituelle, évoquant des pratiques ancestrales, telles que celles des lavandières, ainsi que des contes et légendes marins.

Au fil de la pratique, l’artiste a développé une relation intime avec les tissus, les considérant presque comme des extensions d’elle-même. Le processus physique de rinçage, de lavage, d’essorage des tissus, voire de leur offrande à l’océan, a un impact profond sur ses sens et sur elle-même. La répétition de ces gestes et l’observation des couleurs dans l’eau semblent avoir un pouvoir de transformation et de métamorphose.
Après que les tissus ont été trempés, puis séchés, ils sont parfois découpés en de multiples morceaux. Ces fragments sont ensuite observés, détaillés et réassemblés pour former parfois d’autres œuvres, intimes ou tridimensionnelles qui peuvent fusionner ensuite avec un site, un lieu d’exposition ou une architecture spécifique. Pour le projet « corps-île » c’est le corps même des assistantes de l’artiste qui est mis en scène à travers un ensemble photographique inédit, entrelaçant ainsi l’organique avec le minéral. 

Anouck Palma, Novembre 2023.