Charlotte
Vitaioli

MÀJ . 17.10.2024

Charlotte Vitaioli, la peinture comme une chanson d’amour.

Henri Guette

Il suffit d’une expression, d’un mot déclencheur. La belle vie. Histoire d’un amour. Et les paroles d’une chanson viennent se mêler à la discussion. C’est aussi simple que dans “On connaît la chanson”, ce film d’Alain Resnais où certaines répliques sont directement issues du répertoire populaire. Charlotte Vitaioli aime à dire qu’elle fait des peintures d’amour comme on fait des chansons d’amour. Elle qui a des facilités à fredonner, propose des images qui s’impriment facilement et qui persistent comme des refrains. Membre du duo musical Club Vérité,qu’elle a fondé avec Soline Chailloux, elle investit autant les costumes que l’espace du décor comme lieu potentiel pour la peinture. Peignant des rideaux de scène aux couleurs de coucher de soleil, à moins que ce ne soit de lever de soleil, elle revendique d’occuper ce lieu du passage. Jouant du simulacre et ne craignant pas de montrer les coulisses, Charlotte Vitaioli affirme qu’il y a une poésie à saisir dans l’illusion quelque soit la tradition spectaculaire à laquelle on se réfère. Dans les espaces qu’elle recrée dans les salles d’exposition, l’artiste montre un monde plus ouvert qu’on ne pourrait le croire. Dans les porosités qu’elle explore notamment avec son projet d’installation-performance Le ballet tribalesque il y a celles de l’art japonais du kabuki et des enseignements d’Oskar Schlemmer, professeur de danse du bauhaus. Il y a plus largement des références au pop art comme aux estampes japonistes d’Henri Rivière dans ces peintures où la ligne claire est appuyée.

Charlotte Vitaioli peint rapidement, de grands gestes énergiques qui saisissent le moment. Ses couleurs franches sur le papier ont quelque chose de sensuel. Le traitement de la surface rappelle le mouvement de l’eau qu’elle aime à représenter, jeux des vagues et écume de l’océan. Ses paysages balnéaires expriment autant la joie qu’une forme de mélancolie. Un homme et une femme. Le Rayon vert. Les jeunes femmes qu’elle représente ont l’allure des icônes de la Nouvelles Vague. On peut penser à Anna Karina ou Brigitte Bardot mais la référence aux jumelles Deneuve et Dorléac chez Jacques Demy est la plus présente. Par la forme même des peintures qui jouent du gros plan : un œil sur une ombrelle, un visage sur un éventail, l’artiste travaille une obsession, une narration presque fétichiste. Chanson ou film d’amour, les peintures de Charlotte Vitaioli nous entretiennent d’une petite musique des sentiments autant que de l’illusion du grand écran.

Charlotte Vitaioli, la peinture comme une chanson d’amour, Henri Guette