Gabrielle
Herveet

MÀJ . 04.09.2025

Les peaux de paysages et le passage des astres

Vues de l'exposition dans la Chapelle des Rohan, Pontivy, L'art dans les Chapelles, 2025

Vues d'ensemble

Les peaux de paysages et le passage des astres

Xavier Grall a écrit à propos des retables bretons qu’ils sont dédiés à l’accord « des choses du ciel et de la Terre », sanctifiant les secrets de la nature, l’eau, le bois, le ciel. En dessous d’un plafond bleu sans étoile, cette installation a été imaginée comme un mélange de tout cela. J’ai fait entrer dans la chapelle des étendues mouvantes, des vagues, des rives, des constellations et des nuages, emmêlés par les branches de vieux arbres.

Le paysage breton, natal et maternel, habite mes pensées et mes rêves depuis toujours. Ses éléments, les astres comme les rivières, égrènent les secondes de nos existences. Horloges millénaires, ces entités naturelles sont regardées et aimées depuis la nuit des temps.

Les peaux de paysages parlent des rivières et de leurs courants infinis. Elles sont faites de matières résiduelles, assemblages d’eaux, de poussières, de boues et de saisons. Coquilles d’huîtres ou schistes bleus sont issus de la transformation de liquides en solides, phénomène organique pour l’un, géologique pour l’autre.

Ces peaux ne sont pas des formes parfaites et toujours séduisantes. Tout comme les paysages, elles s’éteignent, s’animent, changent par le passage des astres ou des nuages. Alors, le matin, la peau de rivière s’augmente de vert, devient surface d’élytres d’insectes ou d’écailles de poissons. L’après-midi, elle se grise et capte les beiges du sol autour d’elle, devient métal argenté, surface d’estuaire. La carte de nacre, quant à elle, se révèle dans la pénombre, elle a besoin d’obliques et de lumière douce.

Les bois viennent de l’estran. Ils n’ont pas été ramenés par l’océan mais sont patinés par les successions des marées du Trieux, ce sont des branches tombées des arbres du rivage.

Les cercles en acier forgé mesurent le temps : chacun représente un mois de l’année 2025. Suspendus, les mois de juillet et d’août compteront les nuits et les jours de l’exposition, l’évolution des phases de la lune. Ils indiqueront notre traversée du nuage de poussière des Perséides et la conjonction de planètes de la fin d’été.

Sirius disparaîtra pour quelques mois, Bételgeuse apparaîtra.

En regard de ce présent, un bronze figure le déplacement du Pôle Nord céleste sur la voûte étoilée. Ce cycle de 25000 ans, la précession des équinoxes, agît en écho au temps séculaire qui habite les chapelles d’ici et à nos regards portés vers le ciel depuis des millénaires.

Gabrielle Herveet, texte du catalogue de la 34eme édition de l’Art dans les chapelles

Couverture en peau de rivière, 2025
Ardoises provenant d'un ancien toit, tissus, colle, 140 x 305 x 4 cm.

Carte vague du Trieux, 2025
Draps bleu, nacre d'huîtres sauvages, colle, 520 x 170 cm.

L'âge des nacres, 2025
Coquilles d’huîtres sauvages du Trieux, percées et cousues sur une couette de petit enfant, fils provenant d'une corde de bateau, 230 x 100 c 10 cm.

D’après Nebra, le ciel autour du pôle nord céleste, 1/8, 2024
Bronze patiné et doré à l’or pâle, 21 x 21 x 5 cm.

Calendrier luni-solaire-stellaire de l’année 2025, 2024
12 cercles en acier forgé dorés à l'or pâle, or jaune, métal oxydé, diamètre 30cm.

Pièce réalisée par les élèves de CAP Ferronnerie d’Art du Lycée du Mont-Châtelet de Varzy (58) lors d’une résidence EMA, hiver 23/24

Photos : Gabrielle Herveet